II - LA PATHOLOGIE SYNOVIALE

Bien que fréquente au niveau de la cheville, elle ne nécessite pas souvent l'utilisation de l'arthroscopie pour son diagnostic ou son traitement. Toutefois celle ci reste dans certains cas incontournable sur le plan thérapeutique.

 

1 - LES RHUMATISMES INFLAMMATOIRES

L'atteinte de la cheville est fréquente dans le cadre des Rh Inflammatoire où les atteintes de la cheville et du pied sont classiques voire specifiques comme dans les FLR.

Les affections les plus souvent rencontrées sont la Polyarthrite Rhumatoïde, le Rhumatisme Psoriasique , la Spondylarthrite ankylosante, le Fissenger Leroy Reiter. L'atteinte survient souvent dans les phases précoces de la maladie dans le cadre d'un syndrome polyarticulaire. Ailleurs elle peut prendre le masque d'une oligo arthrite inflammatoire dont le diagnostic étiologique est confirmé sur la conjonction d'éléments cliniques, biologiques et radiologiques.

Quelle place pour l'arthroscopie dans ces affections?

Contrairement aux pays Ango saxons et surtout nords Americains, la scopie de la cheville ne présente pas ou peu d'intérêt diagnostic. Sur le plan thérapeutique, elle rentre dans le cadre d'une stratégie globale de la maladie et rentre dans le cadre des traitements locaux. Or il semble que par expérience que les autres traitements locaux laissent en France du moins peu de place pour, la scopie. Dans les Unités de Rhumatologies elle prend place en cas d'echec des synoviorthèses chimiques ou isotopiques. Ce qui fait que les séries de synovectomies Françaises restent anémiques comparées aux Américaines, ces derniers n'utilisant quasiment pas les synoviorthèses.

Le seul interêt de l'arthroscopie reste donc : La synovectomie.

La technique

Elle necessite que l'exploration articulaire soit aussi complète que possible avec utilasation des voies antero interne et externe associées avec une voie postero externe.

L'utilisation une traction par sangle ou par tout autre système peut être nexcessaire sans être indispensable pour ce geste .

Elle se pratique avec une instrumentation le plus souvent spécifique de faible diamètre : arthroscopes de 2,7 mm grand angle forobliques à 30 et 70°. Les lames de résecteurs seront de 2;7 ou de 3,5 mm pour pouvoir atteindre les rampes et surtout la chambre postérieure.

Une arrivée de liquide de perfusion indépendante est necessaire pour limiter l'effet de succion du shaver qui gène la vision. La pompe est utilisée par certains mais ne nous a pas semblé indispensable dans notre expérience.

Certains utilisent une instrumentation avec un système de canules qui permettent une invertion rapide des instruments.

La synovectomie débutera par par la chambre antérieure pour ensuite de proche en proche nettoyer les rampes. En fin d'intervention, la chambre postérieure sera traitée.

Dans les PR, la synoviale étant friable et fine, il est necessaire d'être prudent dans le traitement des zones antero superficielles et posterieures pour éviter de lèser les structures neuro vasculaires. Il semble necessaire pour minimiser cet inconvénient de ne pas utiliser de résecteurs agressifs avec des "dents" apparentes.

La pose d'un drain aspiratif ne nous a pas semblé necessaire , certains ont signalé son utilisation.

Le port d'une attelle de soutien postérieure dans les suites immédiates associées à une marche avec appui aidé permet des suites plus confortables.

La mobilisation par une rééducation douce précoce visant surtout à la conservation des amplitudes nous parait nécessaire au début.

Limites et intérêt du geste:

Nous avons déjà évoqué le fait que la synovectomie arthroscopique vivait en France des échecs des Synoviorthèses . Dans les pays Américains bien qu'il soit reconnu qu'elle ne puisse être totale, elle est prescrite en première intension et ses résultats bien que transitoires comme tous les gestes locaux dans les Rhumatismes inflammatoires, sont considérés comme bons avec un moindre évolutivité des signes radiologiques à 5 ans chez les patients traités.(12 ,13)

La réarthroscopie survenant quelques années plus tard en cas de rechute. Le pronostic dépendant du controle de la maladie par le traitement de fond et par l'état des surfaces cartilagineuses

2 - LA SYNOVITE VILLONODULAIRE

La SVN est une affection de la synoviale certes bénigne mais dont le potentiel évolutif local reste préoccupant et conditionne le pronostic. Cette affection est le plus souvent retrouvée au niveau du genou ou de la hanche .

Fréquence

Elle est rarement retrouvée au niveau de la cheville.

Bien qu'une publication serbo croate (14) rapporte 47 cas de SVN de cheville sur 20 ans, la plupart des autres publications rapportent le plus souvent des cas isolés. Notons que Green (15) en 91 rapportant un cas de SVN de cheville dans Foot and Ankle, ne retrouvait pas dans sa bibliographie de cas similaires !!!

 

CLINIQUE

Elle se résume le plus souvent à des douleurs, des épisodes de gonflement, une perte modére des amplitudes et des sentiments d'instabilité dus le plus souvent à l'épanchement. La classique hémarthrose isolée n'a pas été signalée même chez les Serbo croates.

Anatomie pathologique:

- Macroscopie

On distingue 3 aspects macroscopiques:

  • La forme tumorale : qui se présente sous la forme d'une masse lobulée du jaune au brun voire violacée de quelques millimètres à quelques centimètres de diamètre parfois oblongue voire sous la forme d'une masse de plusieurs centimètres de long.
  • La forme diffuse : qui prend l'aspect de franges villeuses volumineuses de coloration rouille ou brunes avec parfois une association avec des nodules pouvant envahir l'os en suivant le trajets des éléments vasculaires.

  • La forme mixte : qui associe les deux précédentes , le plus souvent un ou plusieurs nodules entourés d'une synoviale identique à celle recontrée dans les formes diffuses.

- Microscopie

Dans les formes villeuses les franges synoviales sont bordées par 2 à 3 couches de cellules hyperplasiques. Les axes des franges renferment une population de cellule polymorphe avec des cellules macrophagiques.

On retrouve les mêmes cellules dans les formes nodulaires avec présence de cellules spumeuses ou xanthomateuses, plus rares mais constantes des cellules géantes multinuclées.

Enfin la surcharge de pigments ferriques est caractéristique encore qu'elle soit commune avec les synoviales de résorption d'hémarthrose.

Il existe une vascularisation importante qui explique le saignement facile de ces tumeurs.

Dans certaines lésions nodulaires il existe des zones de nécrose au centre donnant la coloration jaune de ces masses.

La proportion des différents élements reste variable suivant les cas.

Le diagnostic le plus difficile à éliminer est l'hyperplasie qui suit les hémarthroses, mais dans ce cas il n'existe pas de prolofération macrophagique.

Imagerie

Le diagnostic est confirmé par l'imagerie. Moins par les radios standards qui le plus souvent restent longtemps muettes que par l'IRM qui permet de retrouver des masses tumorales et de préciser l'extension extra articulaire voire osseuse.(16)

Cet examen qui reste un appoint au diagnostic est le moyen de surveillance qui permet de verifier l'efficacité des traitements proposés et de dépister les éventuelles rechutes.

Certains comme Villani et Yang (17,18) utilisent l'échographie comme imagerie de complément dans le diagnostic et le suivi

pre-op post op

Traitement

Celui ci repose sur la synovectomie aussi complète que possible par arthroscopie associée à une synoviorthèse isotopique dans les semaines qui suivent.

La surveillance est assurée comme nous l'avons vus par l'IRM.

Les résultats dépendent de l'état des surfaces cartilagineuses et des rechutes. En general le pronostic n'est pas meilleur que dans les autres articulations avec des risques de dégradation locaux importants.

Série en collaboration avec François Kelberine

S+Année
age
Diagn
Diffuse
Péd
Geste
Syno
suivi
résultat
F - 81 30 24 oui Scopie Hexa 12 bon !!
M - 82 43 2 oui S + Ch non 24 bon
F - 83 30 7 oui Scopie Hexa 24 arthrodèse
F - 97 22 6 oui S + Ch non 6 TB
M - 97 29 7 oui Scopie non 14 moyen
F - 96 19 24 oui Scopie non 26 bon
F - 95 45 48 oui Scopie Iso 40 PTC 97
F - 97 55 28 oui Scopie Iso 17 bon
F - 98 35 120 oui Scopie Iso 6 bon !!
M - 98 35 36 oui oui Scopie Iso 7 moyen, dome

 

Cette série montre que le retard au diagnostic peut être très important, que les résultats sont variables et semblent se dégrader avec le temps aboutissant une fois à une arthrodèse et une fois à une prothèse, que dans 4 cas sur 10 le recul est insuffisant pour se faire une idée des facteurs pronostics qui semblent être en rapport avec l'atteinte chondrale. Ceci a été le cas dans les deux cas ayant abouti à une chirurgie majeure.

On ne peut conclure à la nécessité de la Synoviorthèse isotopique car le recul est trop court et la série trop courte mais elle nous semble un complément nécessaire si on se reporte à l'expérience qui est celle rencontrée dans les genoux.

Dans ls cas les plus recents , le diagnostic a été évoqué dans 6 cas sur 7 par l'IRM et que le suiv se fait sur cette imagerie.

Il est comme toujours dommage que les cas les plus anciens soient perdus de vue et ne répondent jamais aux relances des enquètes successives !

3 - LES ARTHROPATHIES MICRO CRISTALLINES

La goutte ou la chondrocalcinose articulaire, sont fréquentes au niveau de la cheville. Cette atteinte est caractéristique dans le cadre de la Goutte. Le diagnostic facile de ces affections ne necessite pas l'arthroscopie comme complément diagnostic ou thérapeutique.

Toutefois dans des formes trainantes, torpides, si la biopsie synoviale au trocard est négative, il a été necessaire deux fois dans mon expérience de recourir à l'arthroscopie pour avoir une biopsie dirigée et de découvrir une fois une CCA radiologiquement muette et une fois une authentique goutte urique dont le diagnostic avait été perturbé par l'absorption de médicaments dont les effets secondaires hypouricémiants n'avaient pas dans un premier temps permis de retrouver la marque biologique classique de cette affection.

Enfin, une fois l'arthroscopie a été effectuée pour une CCA, le diagnostic était connu avant le geste. Le nettoyage-lavage de l'articulation ayant entrainé une remission de bonne qualité des douleurs avec un recul de plus de un an.

4 - LES ARTHRITES SEPTIQUES

 

Comme au niveau du genou, une infection articulaire est mieux gèrée par l'arthroscopie qui permet un meilleur recueil du liquide et de la synoviale pour leur mise en culture. Elle permet aussi un nettoyage articulaire avec resection des brides, de la synoviale.

Elle permet une mise en culture précoce du liquide articulaire et des fragments de synoviale. On pensera plus particulièrement à la Tuberculose dont la recrudescence doit rester à l'esprit .

Dans le cas d'infection à germes banaux, la répétition du geste local peut être necessaire . Dans ce cas la mise au repos de l'articulation par une attelle postérieure est indispensable.

5 - LES ARTHROPATHIES HEMOPHILIQUES

L'atteinte de la cheville est une source importante de handicap chez les hémophiles. Les hémorragies intra articulaires debutent le plus souvent dans la deuxième décade de la vie et une fois les lésions établies, elles vont progressivement évoluer vers un tableau associant: douleurs, raideur et déformations, ce qui finit par entrainer un handicap majeur chez ces patients. (19)

Les relations sont complexes entre les hémarthroses à répétition, l'hypertrophie synoviale et le developpement d'une arthropathie chez le patient hémophilique.

Il existe de nombreuses attitudes thérapeutiques dans le traitement des hémarthroses récidivantes et de la synovite hémophilique. Ceci montre bien qu'aucune n'est parfaite.

Le traitement conservateur comporte le remplacement du facteur de coagulation manquant pendant 3 à 6 mois, associé ou non à une corticothérapie locale le plus souvent, une immobilisation et des traitements physiques. Ceux ci doivent être essayés avant qu'une synovectomie ne soit proposée.

Cette synovectomie peut être pratiquée en chirurgie ouverte, par arthroscopie, voire par synoviorthèse isotopique.

Les synoviorthèses sont indiquées de préférence lors que l'équilibrage de l'hémostase est délicat, lorsque les patients sont atteints par les virus de l'Hépatite ou le HIV. De même lorsque les atteintes sont multiples, les synoviorthèses restent préférables.

La synovectomie arthroscopique est indiquée dans les atteinte de la cheville et du genou. Le gros risque de ces interventions sont la raideur ce qui est un problème majeur chez les jeunes enfants qui coopèrent mal pendant les programmes de rééducation . (20)

De nombreux auteurs rapportent leur expérience de la synovectomie dans les atteintes de la cheville confirmant une efficacité supérieure à la synovectomie ouverte, car elle est mieux supportée par les patients et entrainant moins de raideurs en post opératoire (21) .

Je n'en ai pas l'expérience.

Enfin signalons pour clore le chapitre de la pathologie synoviale de la cheville que certains ont décrit des replis synoviaux dans la cheville qu'il est difficile d'assimiler à des plicae car souvent ils sont retrouvés lors de sequelles d'entorse et ne sont peut être que des replis fibreux cicatriciels post entorse.

 

BIBLIOGRAPHIE

1 - Chen U.C. Arthroscopy of the Ankle Joint. Arthroscopy , 1976 1:16-22

2 - Andrews JR , Previte, W.J.,and Carson,W.G.: Arthroscopy of the ankle: technique and normal anatomy. Orthop. Trans.,1984,8 , 190-202

3 - Conti V. Arthroscopy in réhabilitation. Orthop. Clin . North . Am . 1979. A0: 709-712

4 - Parisien . J S : The role of arthroscopy in the diagnosis and treatment of disorders of the ankle

5 - McGinty JB : Arthroscopic removal loose bodies Orth Clin North Am , 1982,13, 313-328

6 - Parisien. J S : Diagnostic and operative arthroscopy of the ankle techniques and indications. Bull Hosp Jt Dis Orthop Inst ,1985,45,38-45

7 - Milgram JW. Synovial osteochondromatosis. J Bone Joint Surg 1977;59A:792

8 - Holm CL J Bone Joint Surg 1976 ;58A:878

9 - Dorfmann. H, Bonvarlet. J.P., Caille. A , Chondromatose du genou Annales de la SFA 1993, n° 3 , p 135-139

10 - H. Dorfmann, B. de Bie, JP Bonvarlet , and Th Boyer, Arthroscopic Treatment of Synovial Chondromatosis of the Knee, Arthroscopy Vol 5, N° 1 , 1989 , p 48-52.

11 - Hegy Pascale Mémoire de CES Rhumatologie Paris 1986 ; FacultéParis V. Arthroscopie de cheville a propose d'une série de 46 cas

12 - Akagi S. Sugano H. Ogawa R. The long-term results of ankle joint synovectomy for rheumatoid arthritis.

Clinical Rheumatology. 16(3):284-90, 1997 May.

13 - AschanW,Moberg E. A long term study of the effect of early synovectomy in rheumatoid arthritis Bull Hosp Jt Dis Orthop Inst 1984; 44:106-114

14 - Pavlica L; Nikolic D; Tadic J; Tatic V; Bralovic S; Panajotovic L ; Pigmented villonodular synovitis--analysis of 50 patients. Vojnosanit Pregl, 1997 May, 54:3, 209-16

15 - Green A; Sutherland W; Trafton PG . Localized nodular synovitis of the ankle: a case report. Foot Ankle (United States), Aug 1991, 12(1) p47-51

16 - Konrath GA; Shifrin LZ; Nahigian K ; Magnetic resonance imaging in the diagnosis of localized pigmented villonodular synovitis of the ankle: a case report. : Foot Ankle Int (United States), Feb 1994, 15(2) p84-7

17 - Villani C; Tucci G; Di Mille M; Di Gennaro S; Corsi A ; Extra-articular localized nodular synovitis (giant cell tumor of tendon sheath origin) attached to the subtalar joint. Foot Ankle Int, 1996 Jul, 17:7, 413-6

18 - Yang PY; Wang CL; Wu CT; Wang TG; Hsieh FJ ; Sonography of pigmented villonodular synovitis in the ankle joint. J Clin Ultrasound, 1998 Mar, 26:3, 166-70

19 - Ribbans, W. J. and Phillips, A. M.. Hemophilic Ankle Arthropathy. Clinical Orthopaedics and Related Research N°. 328, July 1996, pp. 39-45

20 - Gilbert MS; Radomisli TE. Therapeutic options in the management of hemophilic synovitis. Clin Orthop, 1997 Oct, :343, 88-92

21 - Patti JE; Mayo WE. Arthroscopic synovectomy for recurrent hemarthrosis of the ankle in hemophilia. Arthroscopy, 1996 Dec, 12:6, 652-6

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Docteur Jean paul BONVARLET